Je pensais que je n’avais aucune existence légitime. Je ne trouvais pas ma place dans ma famille d’adoption. J’avais pris la place de ma demi-sœur, décédée d’un cancer des os. Ma grand-mère m’a bien fait ressentir qu’elle ne m’acceptait pas. Elle avait souhaité l’adoption d’un petit garçon mais pas d’une petite fille.

Ma mère me frappait quand elle était hystérique, mon frère était également violent, ma grand-mère me détestait et m’affublait d’un surnom affreux, donc je me suis mise à me détester puis à me haïr.  Un jour, je me suis frappée avec une chaussure, je pensais que je méritais des coups, je voulais me faire mal, ressentir la douleur, l’extraire de mon ventre. Je commençais à croire que la violence était normale.

En grandissant, j’ai observé que les hommes commençaient à me regarder et j’ai cru que leurs intentions étaient pures, que c’était de l’amour. Quand j’ai subi des abus de leur part, je me suis encore plus détestée, je me sentais sale, honteuse !

Je me respectais de moins en moins, je me suis laissée abuser. Je m’en fichais  ! J’avais si peu de valeur à mes yeux, et encore moins mon corps !

La haine envers moi était bien installée. Je me détestais, je me rejetais.

Je ne savais pas que je faisais l’écho de toutes ces personnes qui ne s’aimaient pas elles-mêmes. Elles avaient projeté sur moi leur propre haine d’elles-mêmes. Ce n’était pas moi que je détestais, c’était toutes ces personnes qui m’avaient laissé leurs empreintes de mésestime d’elles-mêmes.

Ce rejet de soi ne m’appartenait pas, il appartenait à toutes ces personnes abusives, qui elles-mêmes l’avaient reçu d’autres personnes.